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Chapter 5 - PREMIER TEST

*« Le vrai test d'un prédateur n'est pas sa capacité à tuer, mais sa capacité à choisir de ne pas le faire. »*

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Les trois jours qui suivirent l'investigation furent les plus longs de ma vie.

Elena avait eu raison – nous devions faire profil bas. Cela signifiait retourner aux cours normaux, faire semblant d'être des étudiants ordinaires, et surtout, éviter tout usage de mes pouvoirs vampiriques. Mais l'abstinence forcée avait des conséquences que ni elle ni moi n'avions anticipées.

La soif revenait plus forte chaque jour.

Ce n'était plus une sensation gérable, comme cette faim constante mais supportable que j'avais appris à contrôler. C'était devenu quelque chose de viscéral, de désespéré. Mes sens aiguisés captaient l'énergie vitale de chaque personne que je croisais, et la tentation de tendre la main et de *prendre* devenait presque irrésistible.

Pire encore, les cours d'Aurelius étaient devenus un supplice particulier. Il ne cessait de m'observer, me posant des questions apparemment innocentes sur ma "progression récente" et mes "nouvelles techniques". Et à chaque fois que son regard doré se posait sur moi, j'avais l'impression qu'il voyait à travers tous mes mensonges.

Ce matin-là, en me dirigeant vers le cours de combat pratique, je dus m'arrêter dans un couloir vide et m'appuyer contre un mur, submergé par une vague de soif si intense qu'elle me donnait le vertige.

*Juste un petit drain,* murmura une voix dans ma tête – ma voix, mais pas tout à fait. *Un contact "accidentel" avec un camarade. Personne ne remarquerait...*

« Non, » sifflai-je entre mes dents, serrant les poings si fort que mes ongles s'enfoncèrent dans mes paumes. « Je ne ferai pas ça. »

*Pourquoi te tortures-tu ainsi ?* La voix était plus claire maintenant, plus distincte. *Tu es un prédateur. C'est ta nature. Arrête de lutter contre ce que tu es.*

Cette fois, je reconnus la voix. Kaelen. Mon ancêtre vampirique ne se contentait plus de murmures occasionnels – il avait des conversations avec moi.

« Je ne suis pas toi, » murmurai-je. « Je ne serai jamais toi. »

*Non ? Alors pourquoi ressens-tu un tel plaisir quand tu draines ? Pourquoi ton cœur s'accélère-t-il quand tu sens l'énergie vitale des autres ?*

Parce qu'il avait raison, et c'était ça le plus terrifiant. La partie de moi qui prenait plaisir au drain grandissait chaque jour, et elle devenait de plus en plus difficile à ignorer.

« Kain ? »

Je sursautai et me retournai pour voir Elena qui s'approchait, un sac de livres à l'épaule. Son expression s'assombrit immédiatement quand elle vit mon état.

« Tu vas mal, » dit-elle. Ce n'était pas une question.

« Je... » J'essayai de trouver les mots pour décrire ce que je ressentais, mais comment expliquer qu'on avait l'impression de se noyer dans sa propre soif ? « C'est pire qu'avant. Beaucoup pire. »

Elena jeta un coup d'œil dans le couloir pour s'assurer que nous étions seuls, puis s'approcha plus près. « Depuis combien de temps tu n'as pas drainé ? »

« Trois jours. Depuis l'entraînement avec les mannequins. »

« Trois jours... » Elle fronça les sourcils. « Kain, tu développes une dépendance physique. Plus tu utilises tes pouvoirs, plus ton corps s'habitue à un apport régulier d'énergie externe. L'arrêter brutalement peut être... dangereux. »

« Dangereux comment ? »

« Perte de contrôle. Épisodes de drain involontaire. Et... » Elle hésita. « Personnalité fragmentée. La soif peut devenir si intense qu'elle prend temporairement le contrôle de tes actions. »

Comme si elle avait donné le signal, une nouvelle vague de soif me submergea, plus intense que la précédente. Mes yeux se fixèrent involontairement sur le cou d'Elena, où je pouvais voir son pouls battre sous sa peau pâle. L'envie de me pencher vers elle, de poser mes lèvres sur cette peau tendre et de drainer cette énergie vitale si tentante devint presque irrésistible.

« Kain. » La voix d'Elena était devenue très ferme. « Regarde-moi. Mes yeux, pas mon cou. »

Je forçai mon regard à remonter vers son visage. Ses yeux verts étaient alertes mais pas terrifiés. Inquiets, mais pas paniqués.

« Voilà. » Elle parlait d'une voix douce mais autoritaire, comme on parlerait à un animal dangereux. « Tu es encore là. Tu as encore le contrôle. »

« Pour l'instant, » haletai-je. « Mais Elena... je ne sais pas combien de temps je peux tenir. »

« Alors nous allons faire quelque chose à ce sujet. » Elle jeta un nouveau coup d'œil dans le couloir. « Pas ici. Trop risqué. Mais après les cours... je connais un endroit. »

« Quel endroit ? »

« Un endroit où tu pourras drainer sans risquer de blesser quelqu'un d'innocent. » Son expression était devenue grave. « Mais Kain... ce que je vais te montrer va changer la façon dont tu vois le monde. Et il n'y aura pas de retour en arrière possible. »

*Excellent,* murmura la voix de Kaelen dans ma tête. *Enfin, nous progressons.*

Je l'ignorai et me concentrai sur Elena. « Qu'est-ce que tu veux dire ? »

« Il y a des choses sur cette académie, sur cet empire, que tu ne sais pas encore. Des choses sombres. » Elle ajusta son sac sur son épaule. « Et si tu veux devenir assez fort pour survivre à ce qui vient, tu vas devoir apprendre la vérité. »

Avant que je puisse répondre, la cloche sonna, annonçant le début des cours. Elena me pressa brièvement la main – un contact réconfortant même à travers ses amulettes de protection.

« Tiens bon jusqu'à ce soir, » murmura-t-elle. « Je te promets que nous allons régler ça. »

Le cours de combat pratique fut un cauchemar. Aurelius nous fit travailler par paires, et je fus jumelé avec Marcus Brightshield – le même noble arrogant qui m'avait humilié quelques jours plus tôt. Mais maintenant, avec mes sens vampiriques aiguisés et ma soif qui me rendait à demi fou, être si proche de lui était une torture.

Je pouvais sentir son énergie vitale comme une aura chaude et dorée qui l'entourait. Lignée sacrée pure, puissante, tentante. Chaque fois que nos épées se croisaient, chaque fois qu'il s'approchait assez pour que je sente son souffle, l'envie de laisser tomber mon arme et de lui saisir la gorge devenait presque insurmontable.

« Bien, Vorthak ! » cria Aurelius depuis les gradins. « Enfin un peu d'agressivité ! Continuez comme ça ! »

Marcus recula, surpris par l'intensité soudaine de mes attaques. Et il avait raison d'être surpris – mes mouvements étaient devenus plus fluides, plus rapides, plus impitoyables. Les instincts de combat de Kaelen prenaient le dessus, guidés par ma soif vampirique.

« Qu'est-ce qui t'arrive ? » haleta Marcus en parant une de mes attaques. « Tu te bats comme... comme un possédé. »

*Comme un prédateur,* corrigea la voix de Kaelen. *Montre-lui ce que ça fait d'être une proie.*

« La ferme, » grognai-je entre mes dents, mais je ne savais plus si je m'adressais à Kaelen ou à Marcus.

Mon épée fendit l'air dans un arc parfait qui brisa la garde de Marcus et envoya son arme voler à trois mètres. Avant qu'il puisse réagir, j'avais la pointe de ma lame contre sa gorge, assez proche pour qu'une seule pression de ma part puisse l'entailler.

Le silence s'abattit sur l'arène. Tous les autres étudiants s'étaient arrêtés pour regarder, bouche bée. Marcus me fixait avec des yeux écarquillés, et pour la première fois depuis que je le connaissais, il avait l'air... effrayé.

« Vorthak. » La voix d'Aurelius était devenue glaciale. « Abaissez votre arme. Immédiatement. »

C'est à ce moment-là que je réalisai que ma main tremblait. Pas de peur ou de fatigue – de soif. J'étais si proche de Marcus que je pouvais sentir son énergie vitale comme une brise tiède contre ma peau. Il aurait suffi que je laisse tomber l'épée, que je tende la main...

*Fais-le,* murmura Kaelen. *Il t'a humilié. Il mérite de payer. Prends ce qui t'appartient de droit.*

« Non, » murmurai-je, mais ma voix manquait de conviction.

Marcus avait dû voir quelque chose dans mes yeux – quelque chose qui l'avait terrifié – parce qu'il recula instinctivement, trébuchant presque dans sa hâte de s'éloigner de moi.

« Qu'est-ce que... qu'est-ce qui ne va pas avec tes yeux ? » bégaya-t-il.

Mes yeux ? Je baissai l'épée et portai instinctivement ma main libre à mon visage. Qu'est-ce qu'il voyait ?

« Vorthak ! » Aurelius avait sauté des gradins et s'approchait rapidement. « Repos ! Tous les autres, continuez vos exercices ! »

Je reculai, paniqué. Si Aurelius voyait mes yeux de près, si les filaments rouges étaient visibles...

« Je... je ne me sens pas bien, » balbutiai-je. « Peut-être que je devrais... »

« Infirmerie. Maintenant. » L'ordre d'Aurelius était sans appel. « Et Vorthak ? »

« Oui, Maître ? »

« Nous aurons une conversation privée après les cours. »

Le trajet vers l'infirmerie fut un flou angoissant. Heureusement, l'infirmière de service était une femme âgée et distraite qui accepta sans question mon explication d'un "malaise soudain" et me fit allonger sur un lit de repos avec un linge humide sur le front.

Dès qu'elle eut le dos tourné, je me levai et me dirigeai vers le petit miroir suspendu au mur. Ce que j'y vis me fit presque crier.

Mes yeux n'étaient plus striés de rouge – ils étaient carrément rouge sang. Pas complètement, mais les iris bruns avaient presque entièrement disparu, remplacés par une couleur cramoisie qui brillait faiblement dans la lumière de l'infirmerie.

*Magnifique,* murmura Kaelen avec satisfaction. *Tu commences enfin à ressembler à ce que tu es vraiment.*

« Comment je vais expliquer ça ? » chuchotai-je à mon reflet.

*Pourquoi devrais-tu l'expliquer ? Montre-leur ta vraie nature. Fais-leur peur. Prends ce qui t'appartient.*

« Parce que je ne veux pas devenir un monstre ! »

*Tu ES un monstre. La seule question est de savoir si tu seras un monstre pathétique qui se cache, ou un monstre puissant qui règne.*

Je fermai les yeux et m'appuyai contre le lavabo, luttant contre la vague de soif qui menaçait de me submerger à nouveau. Quand je les rouvris, mes iris étaient revenus à leur couleur brune normale, avec juste quelques filaments rouges encore visibles.

Contrôlable. Explicable comme de la fatigue ou du stress.

Je passai le reste de l'après-midi dans l'infirmerie, prétendant me reposer tout en luttant contre les murmures de plus en plus insistants de Kaelen. L'infirmière finit par me libérer juste avant le dîner, avec des instructions de "prendre du repos et éviter les exercices intenses pendant quelques jours".

Si seulement elle savait.

Elena m'attendait près de la sortie de l'infirmerie, feignant de lire un livre. Dès qu'elle me vit, elle se leva et s'approcha.

« Comment tu te sens ? »

« Comme si j'allais exploser, » admis-je. « Elena, mes yeux... ils sont devenus complètement rouges pendant quelques minutes. Et Kaelen... il me parle. Vraiment, pas juste des murmures. »

Son expression s'assombrit. « Combien de temps avant que tu perdes complètement le contrôle ? »

« Je ne sais pas. Peut-être quelques heures. Peut-être moins. »

« Alors nous n'avons pas le choix. » Elle rangea son livre et me fit signe de la suivre. « Viens. Il est temps que tu voies ce qui se cache vraiment dans cette académie. »

Au lieu de nous diriger vers les dortoirs ou vers l'une des sorties principales, Elena me mena vers une partie de l'académie que je n'avais jamais explorée – une aile ancienne réservée à l'administration et aux archives. Mais au lieu d'entrer dans l'un des bâtiments, elle me guida vers ce qui semblait être un petit cabanon de jardinier près du mur d'enceinte.

« Elena, qu'est-ce qu'on fait ici ? »

« Tu vas voir. » Elle sortit une clé de sa poche – encore une clé que je ne l'avais jamais vue utiliser – et ouvrit la porte du cabanon.

À l'intérieur, là où j'aurais dû voir des outils de jardinage et des sacs d'engrais, il y avait une trappe ouverte dans le sol et une échelle qui descendait dans l'obscurité.

« D'autres tunnels ? »

« Pas des tunnels. » Elena commença à descendre l'échelle. « Quelque chose de beaucoup plus ancien. Et beaucoup plus sombre. »

La descente sembla durer une éternité. Quand nous atteignîmes finalement le fond, nous nous trouvâmes dans un couloir de pierre brute, visiblement beaucoup plus ancien que tout ce que j'avais vu sous l'académie. L'air était lourd et chargé d'une énergie qui faisait vibrer mes sens vampiriques.

« Qu'est-ce que c'est que cet endroit ? »

« Les vraies fondations de l'académie, » répondit Elena en allumant une torche magique. « Construites il y a plus de mille ans, bien avant l'empire actuel. Et officiellement, elles n'existent pas. »

Nous marchâmes en silence pendant plusieurs minutes, descendant toujours plus profondément. L'énergie dans l'air s'intensifiait à chaque pas, et avec elle, ma soif vampirique. Mais c'était une soif différente – plus focalisée, comme si elle était attirée par quelque chose de spécifique devant nous.

Finalement, nous arrivâmes devant une porte massive en métal noir, ornée de symboles que je ne reconnaissais pas. Elena s'arrêta devant et se tourna vers moi.

« Kain, ce que tu vas voir de l'autre côté de cette porte va changer ta perception de tout. De l'académie, de l'empire, de ta place dans le monde. » Sa voix était grave, solennelle. « Es-tu sûr d'être prêt ? »

La soif en moi pulsait maintenant au rythme de mon cœur, attirée par quelque chose au-delà de cette porte comme un aimant. Et dans ma tête, Kaelen riait doucement.

*Enfin. Elle va te montrer la vérité.*

« Quelle vérité ? »

Elena posa sa main sur la poignée de la porte. « Que cette académie n'est pas ce qu'elle prétend être. Que les lignées obscures ne sont pas persécutées par accident. Et que ton héritage vampirique... » Elle me regarda droit dans les yeux. « Pourrait bien être la clé pour changer le cours de l'histoire. »

*Ou pour la répéter,* ajouta Kaelen avec amusement.

Elena tourna la poignée et poussa la porte. Une lumière rouge et tremblotante s'échappa de l'ouverture, accompagnée d'une odeur métallique que mes sens vampiriques reconnurent immédiatement.

Du sang. Beaucoup de sang.

« Bienvenue, » dit Elena d'une voix étrangement formelle, « dans le vrai laboratoire de l'Académie Impériale Valdris. »

Je la suivis à travers la porte, et ce que je vis de l'autre côté me fit reculer d'horreur.

La salle était vaste, éclairée par des cristaux rouges qui diffusaient une lumière sanglante. Le long des murs s'alignaient des dizaines de cellules, et dans chacune d'elles...

Des gens. Ou ce qui avait été des gens.

Certains étaient suspendus par des chaînes, d'autres allongés sur des tables d'examen. Tous portaient les marques d'expérimentations atroces – cicatrices, membres manquants, yeux arrachés. Et tous étaient encore vivants, gémissant faiblement dans la semi-obscurité.

« Mon Dieu, » murmurai-je. « Qu'est-ce que c'est que ça ? »

« Le vrai programme de recherche de l'académie, » répondit Elena d'une voix glaciale. « Expérimentation sur les lignées obscures. Torture systématique pour comprendre leurs pouvoirs. Et quand ils ne sont plus utiles pour la recherche... »

Elle me montra une section particulière de la salle, où des corps desséchés étaient empilés comme du bois de chauffage.

« ...ils servent de nourriture pour leurs vampires domestiques. »

Comme si ses mots avaient été un signal, une silhouette émergea de l'ombre au fond de la salle. Grand, émacié, avec des yeux entièrement rouges et des canines qui dépassaient de ses lèvres. Un vampire, mais pas comme moi. Celui-ci avait perdu toute trace d'humanité, transformé en un prédateur pur et simple.

Il nous regarda, puis sourit, révélant des dents ensanglantées.

« Visiteurs, » dit-il d'une voix rauque. « Comme c'est... délicieux. »

*Maintenant,* murmura Kaelen dans ma tête, *tu vas apprendre ce que c'est vraiment que d'être un vampire.*

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**FIN DU CHAPITRE 5**

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