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Chapter 1 - Chapitre 1

La nuit avait englouti la ville sous un rideau de pluie. James se tenait devant la vaste baie vitrée de son bureau, observant les gouttes qui crépitaient avec obstination contre le verre. L'écho régulier de l'averse résonnait comme un métronome, accentuant le tumulte intérieur qui l'habitait.

À trente-deux ans, il avait tout conquis : pouvoir, richesse, respect. Mais ce soir, tout lui paraissait vain. Le message qu'il venait de lire résonnait dans son esprit comme une sentence irrévocable : son père était mort.

Un poids écrasant lui serra la poitrine. Cet homme n'avait pas seulement été un mentor ou un modèle, il avait été son roc, son guide. Son absence ouvrait en lui une brèche que rien ne semblait pouvoir combler. Inspirant profondément, James attrapa sa veste et quitta son bureau dans un silence solennel.

Sa voiture de luxe l'attendait, immobile et luisante sous la pluie. À bord, il roula sans hâte, les souvenirs l'assaillant un à un : des éclats de rire, des conseils sévères, des regards silencieux mais emplis de fierté. Pour la première fois depuis longtemps, James sentit une fissure dans l'armure qu'il avait bâtie autour de lui.

Quand il arriva enfin à la villa familiale, le silence qui régnait dans la demeure le frappa de plein fouet. On aurait dit que chaque mur pleurait la disparition de son maître. Les marches du perron lui semblèrent interminables. En poussant la lourde porte en bois, il sentit aussitôt le poids des regards : sa mère, ses deux frères, et même le personnel proche de la famille, tous figés dans une atmosphère de deuil.

— Bienvenue, Monsieur Boxford, murmura d'une voix brisée M. Palmer, le bras droit de son père.

James hocha gravement la tête avant de prendre la parole, sa voix ferme mais empreinte d'émotion :

— Nous avons perdu notre père. Mais il ne voudrait pas que nous sombrions dans la tristesse. Nous devons trouver la force de nous relever.

Simon, son cadet, fronça les sourcils.

— Laisse-nous au moins le temps de faire notre deuil, James…

James n'insista pas. Il quitta le salon pour s'isoler dans sa chambre, où il s'effondra sur le lit, vidé, presque brisé.

Trois jours plus tard, la cérémonie funèbre rassembla une foule hétéroclite : visages affligés, sourires hypocrites, regards envieux. Son père avait bâti un empire en écrasant ses rivaux ; sa mort en réjouissait certains autant qu'elle attristait d'autres. James le savait. Et désormais, c'était à lui de porter ce fardeau.

Alors qu'il s'éloignait du cortège, une voix familière l'interpella.

— James…

Il se retourna. Angela Ford. Son ex. Toujours aussi belle.

— Quelle surprise, Angie, dit-il, le ton froid.

— Même aux obsèques de ton père, tu restes de marbre, constata-t-elle en esquissant un sourire ironique.

— Je fais mon deuil à ma façon, répondit-il sèchement.

Elle s'approcha, posa une main sur son bras.

— Tu sais, toi et moi… on devrait se remettre ensemble.

James retira son bras, l'air las.

— Pas maintenant, Angie. Pas aujourd'hui.

Le lendemain, dans le bureau du défunt patriarche, la famille se réunit. M. Palmer ouvrit le testament. Sa voix, habituellement assurée, tremblait légèrement.

— Selon la volonté de Monsieur Boxford, l'entreprise sera dirigée par ses trois fils, James en étant le principal responsable.

Un murmure traversa la pièce. Mais Palmer n'avait pas terminé.

— Il lègue également vingt pour cent de sa fortune à une certaine Kate Lansford… et quinze pour cent à Madame Boxford.

Le silence fut brutal. Maggie Boxford, la mère, éclata de colère.

— Qu'est-ce que ça veut dire ?! Qui est cette femme ?! Mon mari avait une maîtresse ?!

James tenta de calmer la tempête.

— Maman, attends. Écoutons Palmer avant de conclure.

Palmer inspira, ses mains tremblantes serrant le document.

— Kate Lansford n'est pas une inconnue. Elle est… la fille de la femme que votre père a aimée dans sa jeunesse. Une femme qu'il a perdue en choisissant le pouvoir. Lorsqu'il a découvert l'existence de Kate, il s'est juré de veiller sur elle. Elle est la fille qu'il n'a jamais eue. Et sa dernière volonté… est qu'elle vive ici, parmi vous, protégée par James. Sans cela, aucun de vous n'héritera de sa fortune. Tout reviendra à Kate.

Un silence pesant envahit la pièce. Maggie, blême, quitta la salle d'un pas vacillant. Simon éclata d'un rire amer.

— Quelle ironie… Nous voilà contraints d'accueillir une étrangère sous notre toit.

James resta de marbre, mais en lui, une étincelle de colère et d'incrédulité venait de s'allumer. Qui était vraiment Kate Lansford ?

—Il est temps qu'on aille chercher raiponce de sa tour dit-il en lançan un regard à monsieur palmer

Pendant ce temps, dans un petit village d'Écosse, Kate, vêtue d'une robe fleurie et d'un chapeau de paille, profitait d'une promenade tranquille. Elle vivait simplement, loin des intrigues et du faste de la ville. Son seul repère avait toujours été Monsieur Boxford, qui, chaque mois, venait la voir comme un père attentif. Mais depuis deux mois, plus rien. Son absence la rongeait d'inquiétude.

Quand elle rentra chez elle, elle fut surprise de voir une voiture grise devant sa porte. Soulagée, elle reconnut M. Palmer et courut se jeter dans ses bras.

— Vous m'avez tant manqué, balbutia-t-elle en pleurant. J'ai cru… j'ai cru que vous ne reviendriez pas.

Palmer la serra doucement, le regard empreint d'une tristesse qu'elle ne comprenait pas encore.

— Les retrouvailles sont terminées princesse , déclara alors une voix derrière elle. Faites vos bagages. Nous partons.

Kate se retourna et découvrit un homme grand, aux épaules solides, à la prestance presque intimidante. Son visage lui rappela étrangement celui de Boxford, mais plus jeune, plus dur. Ses yeux, d'un éclat froid, la fixaient avec intensité.

— Qui êtes-vous ? demanda-t-elle, méfiante.

— Disons… ton prince charmant, répondit-il d'un ton ironique, avant de balayer du regard sa maison de bois. Et je viens t'arracher à ce… trou perdu.

Kate se figea, choquée.

— De quel droit critiquez-vous ma maison ?!

— Du même droit que toi, tu t'apprêtes à t'immiscer dans ma famille, lança-t-il d'une voix glaciale.

Elle resta interdite. Cet homme… faisait partie des Boxford. Et il venait de briser son monde en quelques mots.

_je comprends pas

Il lui lança un regard avant de continuer

—eh bien monsieur palmer expliquer lui donc.

Kate s'était figée quand les mots étaient tombés.

« Ton père… est mort. »

La voix grave de M. Palmer vibrait encore dans l'air, mais elle refusait d'y croire. Son cœur battait si fort qu'elle en avait la nausée. Ses jambes tremblaient. Le vieux parquet de sa maison, habituellement si réconfortant, lui sembla soudain étranger.

— Non… non, ce n'est pas possible… souffla-t-elle, les yeux noyés de larmes.

Palmer posa une main bienveillante sur son épaule.

— Je sais que c'est difficile. Mais il le voulait… il voulait que tu sois protégée.

Kate secoua la tête, se dirigeant instinctivement vers la petite étagère où s'alignaient des souvenirs : un carnet de cuir, des photos, une montre à gousset offerte par Monsieur Boxford lors de ses dix-huit ans. Tout respirait encore sa présence. Elle caressa les objets du bout des doigts, comme pour les retenir.

— Je ne peux pas partir d'ici… c'est ma maison. C'est tout ce qu'il me reste de lui…

Palmer soupira doucement, ses yeux brillants d'une tristesse contenue.

— Justement, Kate. C'est pour honorer sa mémoire que tu dois partir. Ton père a laissé des instructions. Tu dois vivre auprès des Boxford, à Londres. Tu auras ta place là-bas.

À ces mots, un rictus moqueur fendit le visage de James, qui observait la scène à quelques pas, appuyé contre la porte.

— Ta place ? répéta-t-il d'un ton glacé. Ne te fais pas d'illusions, Lansford. Tu entres dans une maison qui n'est pas la tienne.

Kate releva brusquement la tête vers lui. Ses yeux rougis par les larmes étincelaient d'une colère qu'elle n'avait pas prévue.

— Vous êtes odieux.

— Réaliste, corrigea James, son regard dur planté dans le sien.

Le départ fut un supplice. Palmer l'aida à préparer ses affaires, pliant ses vêtements, rangeant quelques objets précieux dans une vieille valise. Kate, elle, s'attardait sur chaque recoin : la fenêtre donnant sur le champ de fleurs, la chaise en bois où Boxford s'asseyait pour lui lire des histoires, la cuisine où il avait ri avec elle tant de fois.

Chaque geste lui coûtait. Chaque pas la blessait.

Quand enfin la voiture grise s'ébranla, quittant le chemin boueux qui menait à la maison, Kate jeta un dernier regard en arrière. Son cœur se serra si fort qu'elle crut suffoquer.

À l'avant, James conduisait, le visage fermé, concentré sur la route. À l'arrière, Kate serrait ses mains l'une contre l'autre, le regard fixé sur les paysages qui défilaient. Palmer, assis à côté d'elle, tentait de meubler le silence.

— Kate, je sais que c'est brutal. Mais ton père voulait que tu sois en sécurité. Il voulait que tu sois reconnue… que tu ne sois plus seule.

Elle hocha la tête, incapable de parler. Une larme roula malgré elle.

James jeta un coup d'œil dans le rétroviseur, un demi-sourire ironique aux lèvres.

— Tu vas devoir être plus forte que ça, Lansford. À Londres, les larmes ne servent à rien.

Elle serra les poings.

— Vous ne savez rien de moi.

— Pas encore, concéda-t-il, sa voix basse et tranchante. Mais crois-moi… je saurai.

La tension emplissait l'habitacle. Palmer détourna le regard, impuissant.

Et ainsi, dans un silence lourd et étouffant, la route jusqu'à Londres devint le théâtre invisible d'une guerre qui venait à peine de commencer.

La voiture filait sur la route bordée de champs. Le ciel bas, gris et pesant, semblait refléter l'atmosphère glaciale dans l'habitacle.

Kate avait gardé le silence depuis un long moment, son front appuyé contre la vitre froide. Les souvenirs s'entrechoquaient encore dans sa tête : les éclats de rire de Monsieur Boxford, ses gestes patients, sa voix grave lui disant toujours « tu n'es jamais seule ».

Mais voilà qu'elle l'était. Ou du moins, elle s'en sentait ainsi.

Palmer, assis à côté d'elle, tentait par moments de briser ce mutisme :

— À Londres, tu auras ta chambre, un espace à toi. Ta vie ne s'arrête pas ici, Kate. Elle… commence autrement.

Elle hocha faiblement la tête.

James, au volant, laissa échapper un rire bref, amer.

— « Commence autrement », répéta-t-il avec sarcasme. Non, Lansford. À Londres, tu entres dans une cage dorée. Crois-moi, il n'y a rien de plus cruel qu'une liberté qu'on t'arrache sous prétexte de protection.

Kate se redressa brusquement, ses yeux brûlants fixés sur le reflet de James dans le rétroviseur.

— Et vous, vous parlez de liberté ?

Le sourire de James se crispa.

— Attention à ta langue princesse. Tu ne sais pas dans quelle maison tu mets les pieds.

Un sourire glacé tordit les lèvres de James. Ses doigts se crispèrent sur le volant, mais il ne détourna pas le regard de la route.

Les mots résonnèrent, cruels, impitoyables. Kate détourna les yeux, mordant l'intérieur de sa joue pour ne pas pleurer devant lui.

Palmer posa une main ferme sur son épaule, comme pour l'ancrer.

— N'écoute pas, Kate. Monsieur Boxford t'aimait comme sa propre fille. C'est ça qui compte.

Mais au fond d'elle, Kate savait que James avait frappé là où ça faisait le plus mal.

La voiture s'arrêta devant la vaste demeure victorienne, fièrement dressée derrière ses grilles noires. Le cœur de Kate battait trop vite dans sa poitrine. Elle inspira profondément quand M. Palmer vint lui ouvrir la portière.

À peine eut-elle posé un pied sur les marches de marbre qu'elle sentit l'atmosphère pesante. Trois silhouettes se tenaient déjà dans l'entrée, comme si elles l'attendaient.

Maggie, élégante mais glaciale, la détailla de haut en bas, le menton relevé. Ses yeux brillaient d'une hostilité assumée.

— Alors, c'est donc elle… souffla-t-elle, avec ce ton venimeux qui n'avait pas besoin d'être fort pour blesser.

Kate baissa légèrement le regard, mal à l'aise, mais avant même qu'elle puisse répondre, Simon s'avança. Grand, charismatique, un sourire ironique au coin des lèvres.

— On doit t'appeler Kate ? dit-il en plantant son regard dans le sien. Ou bien… la maîtresse de notre père ?

Un rire bref, cruel, s'échappa de ses lèvres. La pique tomba comme une gifle. Kate sentit ses joues s'embraser, mais elle resta figée, incapable de trouver les mots.

Un peu en retrait, Jack se tenait les mains dans les poches. Il ne dit presque rien, se contentant d'un geste de tête pour la saluer. Son regard, plus sombre que dur, semblait dire qu'il n'avait pas encore choisi s'il devait la haïr ou l'ignorer.

Le silence se fit, lourd, insoutenable. Même Palmer, qui d'ordinaire ne s'en mêlait pas, semblait chercher une issue à cette tension.

Kate inspira, tenta de rassembler son courage. Elle avait toujours su que cette maison ne l'accueillerait pas à bras ouverts. Mais sentir ces trois regards peser sur elle comme autant de jugements était une épreuve bien différente de ce qu'elle avait imaginé

La tension était à son comble dans le hall. Maggie croisa les bras, un sourire satisfait au coin des lèvres. Simon continuait de toiser Kate, comme s'il attendait qu'elle craque, et Jack, silencieux, s'était déjà légèrement détourné, comme pour marquer son indifférence.

C'est à ce moment-là que la voix de James retentit derrière eux, claire et un brin sèche :

— Vous avez fini, oui ?

Les trois se retournèrent. James descendait les marches du grand escalier, les mains dans les poches, l'air nonchalant mais le regard dur.

— Sérieusement, c'est comme ça que vous l'accueillez ? lança-t-il. Bravo. Remarquable sens de l'hospitalité. Vous l'attendez à trois contre un comme des vautours et vous appelez ça de la famille ?

Maggie haussa un sourcil, piquée.

— Oh, pardonne-nous, James. On n'a pas ton sens du drame.

— Ni ton goût pour les causes perdues, ajouta Simon, sarcastique.

James claqua de la langue et avança vers Kate, se plaçant légèrement à ses côtés comme un rempart implicite.

— Peut-être. Mais moi au moins je n'ai pas eu besoin de la dévisager comme un trophée qu'on déteste avant même d'avoir ouvert la bouche.

Un silence, encore. Maggie serra les dents, Simon détourna le regard avec un rire bref, et Jack haussa simplement les épaules.

Kate, elle, n'avait pas dit un mot. Mais malgré la chaleur dans sa poitrine et ses mains moites, elle sentit une étrange bouffée de soulagement. James, avec son insolence et son ton provocateur, venait de briser l'étau qui se refermait sur elle.

M. Palmer, qui observait la scène à distance, s'éclaircit doucement la gorge.

— Mademoiselle, si vous voulez bien me suivre… je vais vous conduire à votre chambre.

Kate hocha la tête rapidement, heureuse d'avoir une échappatoire. James, d'un geste discret, lui fit signe d'avancer, comme pour dire ne les écoute pas.

Elle le suivit du regard quelques secondes, puis emboîta le pas de Palmer. Ses talons résonnaient dans les couloirs de la villa tandis qu'elle montait l'escalier.

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