WebNovels

Chapter 56 - Un homme banal

Grand Line.

Nouveau monde.

Un navire surfait sur les vagues d’une tempête dévastatrice.

Tous les membres de l’équipage étaient surmenés et à bout de force, mais ils ne s’arrêtèrent pas, car s’ils le faisaient, ils signeraient leur arrêt de mort.

Et dans les cabines profondes du navire gisaient à même le sol des…

Humains ?

Enchaînés et battus, leurs yeux ne montraient aucun signe de vie et pourtant leur respiration était présente et facilement confirmable.

Ils semblaient être des esclaves, à vue de leur tenue et de leur état physique et émotionnel.

De pauvres esclaves.

Enchaînée aux pieds sur un piquet qui était lui-même relié au navire, Sophia regardait ses mains d’un air absent.

La cabine sentait le sel, la sueur et le bois pourri. L’air y était lourd et presque vivant à cause de son épaisseur, presque comme si le navire lui-même étouffait. Sophia restait recroquevillée dans un coin, les chaînes froides serrées autour de ses chevilles, le dos brûlant de blessures fraîches.

Deux cordes épaisses retenaient ses mains pour ne pas qu’elle ne résiste et n’ait des pensées de liberté.

« Pas comme si je pouvais de toute façon. » murmura-t-elle à elle-même d’un ton dérisoire.

Cela allait faire plus de deux mois depuis qu’elle s’était fait attraper par cet esclavagiste qui lui avait ôté son “précieux” et qui l’avait enfermée dans cette cabine qui puait et suintait la pisse et la crasse.

Au cours de ces deux longs et douloureux mois, Sophia eut le temps d’accepter sa situation précaire.

Commençant par un choc et un déni profond de la situation dans laquelle elle se trouvait.

À la colère et la haine envers elle-même.

« Si j’étais plus forte, cela ne serait pas arrivé. » se disait-elle au début.

Mais très vite, cela changea.

Car quand elle s’était rendu compte que cela n’allait rien changer…

Elle tomba en dépression et une tristesse comme elle n’en avait jamais connue l’assaillit.

Avec personne à qui parler et échanger, Sophia resta dans cet état presque tout le long et périlleux voyage du navire, qui appartenait très certainement à des esclavagistes.

Mais malgré cela, elle finit par accepter son destin et cette situation, bien que très douloureusement.

Après des dizaines d’autres hommes et même des femmes qui étaient passés par son corps durant ces deux mois, elle ne pouvait que l’accepter.

Si elle ne le faisait pas, alors que pouvait-elle faire d’autre ?

La réponse ?

Rien.

Elle ne pouvait rien faire dans son état.

Elle avait crié.

Elle avait pleuré.

Elle avait essayé d’écouter.

Elle avait essayé de comprendre.

Mais rien.

Il n’y avait rien à en tirer d’autre que c’était son destin.

Son destin, de finir ici, enchaînée comme esclave sexuelle, prête à assouvir malgré elle les penchants atypiques de ses maîtres.

« Triste destin. »

« En effet, triste destin. » répéta Sophia calmement sans même lever la tête, avant de soudainement se figer et de devoir précipitamment lever la tête vers la voix qu’elle venait d’entendre.

Et quand elle leva les yeux…

Il était là.

Accroupi juste devant elle.

Un homme jeune, aux cheveux bruns soigneusement coiffés, coiffé d’un chapeau légèrement incliné. Il portait un long manteau blanc immaculé, bien taillé, drapé sur ses épaules et qui touchait presque le sol sale et puant.

Rien en lui ne brillait ni ne paraissait menaçant. Ses traits étaient calmes, paisibles, presque doux. Un visage ordinaire, mais étrangement réconfortant.

Il la regardait en silence, les bras posés sur ses genoux, comme s’il attendait qu’elle parle la première. Sophia ne bougea pas. Elle se sentit observée, oui, mais pas comme une bête de foire, ni comme un bout de chair qui servait à assouvir les penchants les plus sombres de l’humanité, non, il la voyait comme…

Une humaine qui avait besoin d’aide ?

Sophia ne savait pas, c’était la première fois que cela lui arrivait.

Il se pencha légèrement vers elle, avec la lenteur d’un homme qui ne veut effrayer personne.

Reculant précipitamment en arrière, Sophia bégaya de peur et d’effroi.

« Qui es-tu ?! »

Et comme s’il se souvenait de quelque chose, l’homme s’arrêta net et dit d’une voix douce et sans prétention :

« Désolé, je ne me suis pas présenté. »

Se relevant lentement de sorte à ne pas alarmer Sophia, l’homme inconnu, de sa main gauche, enleva son chapeau haut-de-forme d’un geste ample et mesuré et s’inclina légèrement en avant dans une parodie d’une salutation noble.

« Merlin Hermès, à votre service, gente demoiselle. » déclara-t-il avec un sourire fin, presque moqueur.

Sa voix était chaude et posée, comme celle de quelqu’un habitué à parler de manière polie et sans extravagance.

Il se redressa et fit tourner doucement son chapeau entre ses doigts, l’air de s’amuser de son propre geste.

« Je crains que l’endroit ne soit pas à la hauteur d’une si noble rencontre, mais que voulez-vous… les cabines d’esclaves laissent à désirer. »

Il regarda autour de lui, sans vraiment attendre de réponse, puis son regard revint se poser sur Sophia, plus sérieux cette fois, mais toujours sans aucune fluctuation néfaste.

« Et vous… comment dois-je vous appeler, ma chère ? »

Sophia resta un instant sans voix.

Ce n’était ni une blague, ni un jeu.

C’était un étrange mélange de politesse sincère et de légèreté maîtrisée qui la visait pour la mettre à l’aise, elle s’en était rendu compte dès le début.

Elle ne savait pas qui il était, ni ce qu’il voulait, mais pour la première fois depuis longtemps, quelqu’un lui parlait comme à une personne et non comme à une chose.

Alors elle prit son courage et dit d’une voix rauque :

« So- Ahem-, Ahem-, Sophia, je m’appelle Sophia. » réussit finalement Sophia à dire. Sa gorge étant sèche, elle dut tousser pour dégager la voie.

« Quel joli nom, rien de mieux pour une si jolie demoiselle. » déclara Merlin Hermès en souriant sincèrement.

« Merci. »

Sophia rougit légèrement du compliment.

« J’aimerais passer plus de temps avec vous, chère dame, mais je vais devoir m’en aller. Une mission importante impose ma présence. » poursuivit Merlin Hermès en regardant autour de lui en fronçant légèrement les sourcils, inconfortablement.

« Oh. »

Oui, après tout, il ne pouvait pas rester ici, au risque de se faire prendre par—

Attends !

Les esclavagistes ! Je ne les entends plus.

Il y a à peine quelques instants, elle entendait encore leurs pas tapoter violemment le plancher du dessus, mais depuis que—

« Ne vous inquiétez pas pour eux, ils ne vous feront plus de mal. » Et comme s’il lisait dans ses pensées, Merlin Hermès regarda une nouvelle fois autour de lui, mais cette fois-ci avec un air résolu et doux à la fois.

« Que veux-tu dire par là ? » lui demanda-t-elle doucement en évitant de se faire mal à la gorge.

Merlin Hermès ne répondit pas. Il lui fit juste un léger clin d’œil avant que, de sa main droite, il ne claque des doigts.

Un son mélodieux se déversa partout dans la cabine, et une odeur presque divine, du point de vue de Sophia, entra dans ses narines.

Elle leva les mains en l’air pour aspirer plus de cette odeur—

Avant de se rendre compte qu’elle n’était plus enchaînée.

« Qu’est-ce qu’il se passe ?! »

s’écria-t-elle, avant de se rendre compte une nouvelle fois que sa gorge ne lui faisait plus mal.

Ce n’était pas qu’elle, car tous les esclaves s’en rendirent compte et commencèrent à se toucher pour vérifier leurs blessures.

Tout leur avait été guéri, même leur esprit semblait avoir retrouvé sa niaque d’antan.

Au-delà de leurs personnes, même la cabine avait été remodelée et était plus propre et plus rangée.

De grandes tables remplies de nourriture étaient parsemées au milieu de la cabine.

Ce n’était pas logique et très incohérent, et pourtant c’était là.

Sophia sourit pour la première fois depuis longtemps en sentant son corps revenir à son état le plus pur.

Elle sentait même que son “précieux” lui était revenu.

Elle se leva précipitamment.

« Merlin— »

Avant de se figer en voyant que Merlin Hermès avait disparu, elle regarda partout dans la cabine avant de courir précipitamment à l’extérieur et monta sur le pont.

Le pont, lui aussi, semblait avoir été remodelé et plus propre.

Sophia s’attendait à trouver le pont en ruine et plein de sang des victimes de Merlin Hermès, mais c’était très loin de tout cela, car Merlin Hermès semblait y avoir réfléchi et avait tout bien rangé.

Regardant autour d’elle, Sophia trouva un papier à même le sol sur le pont.

Le ramassant précipitamment, elle savait que cela n’était pas dû au hasard.

Une note !

La lisant rapidement et en faisant en sorte de ne rien manquer, Sophia se retrouva à sourire sans même le savoir.

“Chère Sophia,

Je suis désolé de partir sans adieux. Tu méritais mieux que quelques lignes écrites à la hâte, mais le monde ne m’accorde pas toujours le luxe des au revoir, malheureusement.

Je suis venu pour aider, pas pour rester. C’est ce que je suis : un visiteur de l’ombre, un passant dans les histoires des autres. Je ne guéris pas les blessures, je les soulage juste un instant. Ce n’est pas grand-chose, je sais. Mais parfois, un instant suffit.

Tu es plus forte que tu ne le crois. Ce que tu as enduré ne te définit pas. Ce que tu deviendras, en revanche… cela, personne ne pourra te l’enlever.

Je t’ai vue, pour le petit temps qu’on a passé ensemble, je t’ai vraiment vue. Et ce que j’ai vu m’a rappelé pourquoi je fais ce que je fais, même quand je doute, même quand je suis seul.

Prends soin de toi, Sophia. Un jour, tu raconteras ton histoire et d’autres apprendront à se lever grâce à toi.

(Ps : j’ai fait en sorte que le navire s’oriente tout seul vers la base marine la plus proche.)

(Ps : j’ai aussi arrêté la tempête, bien que temporairement.)

— M.H.”

Sophia resta un long moment immobile, la note entre les doigts. Il n’était plus là, mais ses mots flottaient encore autour d’elle, comme une présence douce et discrète.

Pour la première fois depuis longtemps, elle sentit quelque chose de fragile lui réchauffer la poitrine.

De l’espoir.

Redressant son chapeau, Merlin Hermès leva les yeux vers l’horizon.

Derrière lui, un soldat accourait, haletant, un mousquet chargé à la main.

« Amiral ! L’ennemi est proche ! » cria-t-il, la voix frémissante d’un enthousiasme difficile à contenir.

Merlin Hermès hocha la tête, l’air désinvolte, sans quitter l’horizon du regard. Un sourire calme vint effleurer ses lèvres.

« Très bien. Alors préparez-vous… Ce qui arrive risque d’être un peu secouant et dangereux. »

« À vos ordres, Amiral ShiroiHato ! »

Le soldat rugit une dernière fois avant de filer à toute allure vers sa position. Il ne perdait pas de temps.

Ce n’était pas la première mission qu’il menait sous les ordres de l’Amiral ShiroiHato. Il le connaissait. Et surtout, il savait ce qu’il était réellement.

Un monstre… Pas dans le sens cruel ou maléfique. Plutôt quelque chose qui ne devrait pas exister. Comme les créatures étranges qu’on trouve sur Grand Line. Ou même parmi les rangs de la Marine ou parmi les pirates.

Des êtres au pouvoir démesuré, logés dans des corps humains… ou presque. ShiroiHato en faisait clairement partie.

Chassant ses pensées inutiles, le vice-amiral Connor prit position, prêt à affronter ce qui allait inévitablement suivre.

Peut-être que j’y passerai… Alors je dois le faire sérieusement.

Tout cela se déroulait sous les yeux attentifs de Merlin Hermès, qui jetait parfois un regard en arrière, pour s’assurer que chacun était en place.

Mais soudain, son expression changea. Il plissa les yeux, observant l’horizon.

Dans le brouillard, des dizaines de silhouettes se dessinaient lentement.

Quelques secondes s’écoulèrent encore… et une armada de navires, aux allures variées, émergea.

« Ara ara… Capitaine Shiki, le Lion d’Or… Et Capitaine Linlin, le Péché de la Gourmandise. C’est bien la première fois que je vous vois dans un tel état », déclara-t-il d’un ton légèrement surpris, les yeux fixés sur les deux grandes silhouettes dressées sur la proue du navire face à lui.

Blessés, fatigués, les deux capitaines pirates avaient l’air pitoyable, leurs cheveux en bataille, leurs visages marqués par la lutte.

Mais cela ne les rendait pas moins dangereux, bien au contraire.

Un animal acculé est toujours le plus dangereux.

Shiki grogna en voyant l’armada de la Marine. Si ce n’avait été que des soldats il n’y aurait pas eu de problème.

Mais non. Il avait fallu qu’un amiral fasse le déplacement.

Et pas n’importe lequel.

ShiroiHato…

Ce n’était pas leur première rencontre. Mais jamais jusqu’ici ils ne s’étaient affrontés directement. C’était habituellement Barbe Blanche ou le capitaine qui gérait ce genre de situation.

S’il n’était pas aussi grièvement blessé… peut-être qu’il aurait eu une chance.

Même avec Linlin à ses côtés, il n’avait aucune certitude de pouvoir échapper à ShiroiHato sans subir de lourdes pertes.

Les hommes à bord ne sont pas les plus puissants, mais ils représentent une force militaire trop précieuse.

Je ne peux pas les sacrifier pour rien.

Mais ce n’était pas tant sa puissance qui rendait cet amiral dangereux.

C’était lui.

Tout simplement.

Son pouvoir est trop dangereux. 

« Qu’est-ce qu’on fait ? » demanda Linlin en resserrant sa prise sur Napoléon. Elle n’était que légèrement blessée ; une simple fatigue. On pouvait dire qu’elle était presque à son apogée.

Son combat contre d’Astrid et la Bête des Ombres ne l’avait que légèrement ralentie. 

Tel était l’anomalie qu’était Linlin.

Le Péché de la Gourmandise.

Shiki tourna la tête vers elle, le regard dur.

Puis un rictus sauvage et moqueur apparut sur ses lèvres.

« On donne tout… et on laisse le résultat au destin. »

Il n’attendit pas sa réponse. Aussitôt, il s’élançait, les lames dégainait, droit vers ShiroiHato.

« Tch… » Linlin claqua de la langue, agacée par son impulsivité. Mais elle ne pouvait pas le laisser seul. Sans un mot, elle le suivit et attaqua aux côtés de Shiki.

Merlin Hermès, les voyant foncer à deux, éclata d’un rire ravi.

« Vous me flattez… Deux pirates de votre calibre contre moi, un simple Marine qui fait son travail ? »

« Toi, un simple Marine ?! » rugit Shiki, son Haki jaillissant de ses lames sauvagement comme si il réagissait à l’humeur de son propriétaire. « Ferme-la, monstre ! »

« Ça… c’était franchement impoli. » Le ton de Merlin était très calme, complètement contraire à la situation où il se trouvait. 

Il ôta lentement son long manteau frappé de l’inscription « Justice », et le laissa tomber au sol.

« Mille Vallées Slash !!! »

Deux lames obliques imprégnées de Haki foncèrent à une vitesse terrifiante vers le navire de la Marine ou il se trouvait. 

« Ça risque d’être compliqué… mais je compte bien vous capturer, pirates. »

Il serra les poings. Un Haki dense, mélange d’armement et de conquérant, explosa autour de lui en éclairs noirs et gris.

Lui aussi avait la Volonté d’un Roi.

Et il n’avait pas l’intention de céder, peu importe qui se dressait face à lui.

« Miracle Provency ! »

Et tout éclata.

……

ShiroiHato : colombe blanche

More Chapters